Citroën 2CV AZAM 1961

En 1937, Michelin, fabricant français de pneumatiques, rachète Citroën et place Pierre Boulanger comme patron. Il a l’idée de créer une voiture destinée aux classes sociales du monde rural et à faibles revenus, le souci premier étant de permettre à la maison mère Michelin d’accroître son activité de pneumatiques. S’inspirant d’une enquête faite auprès d’un public ciblé, envoyée à plusieurs milliers d’exemplaires à travers l’ensemble du territoire, Boulanger écrit le cahier des charges précis et draconien, définissant le projet « TPV » (« toute petite voiture ») : avec quatre places assises, 50 kg de bagages transportables, 2 CV fiscaux, traction avant (comme les 11 et 15/Six), 60 km/h en vitesse de pointe, boîte à trois vitesses, facile d’entretien, possédant une suspension permettant de traverser un champ labouré avec un panier d’œufs sans en casser un seul, et ne consommant que 3 litres aux 100 kilomètres. Elle doit pouvoir être conduite facilement par un débutant. Et surtout, aucun signe ostentatoire. Le slogan publicitaire « 4 roues sous 1 parapluie » de la fin des années 1960, résume assez bien l’esprit général de ce que le patron attendait.

Il s’agit ici d’une restauration complète

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Un peu d'histoire

En 1937, Michelin, fabricant français de pneumatiques, rachète Citroën et place Pierre Boulanger comme patron. Il a l’idée de créer une voiture destinée aux classes sociales du monde rural et à faibles revenus, le souci premier étant de permettre à la maison mère Michelin d’accroître son activité de pneumatiques. S’inspirant d’une enquête faite auprès d’un public ciblé, envoyée à plusieurs milliers d’exemplaires à travers l’ensemble du territoire, Boulanger écrit le cahier des charges précis et draconien, définissant le projet « TPV » (« toute petite voiture ») : avec quatre places assises, 50 kg de bagages transportables, 2 CV fiscaux, traction avant (comme les 11 et 15/Six), 60 km/h en vitesse de pointe, boîte à trois vitesses, facile d’entretien, possédant une suspension permettant de traverser un champ labouré avec un panier d’œufs sans en casser un seul, et ne consommant que 3 litres aux 100 kilomètres. Elle doit pouvoir être conduite facilement par un débutant. Et surtout, aucun signe ostentatoire. Le slogan publicitaire « 4 roues sous 1 parapluie » de la fin des années 1960, résume assez bien l’esprit général de ce que le patron attendait.

Il désigne André Lefebvre à la tête du bureau d’études, qui a déjà fait ses preuves sur la Traction. Il aura pour associés, Pierre Meyer, Alphonse Forceau s’occupant de la suspension, Jean Muratet spécialiste de la carrosserie, et Flaminio Bertoni. L’équipe a carte blanche, tant qu’il ne s’agit pas d’esthétique ou de performance valorisante. Le projet explore toutes les voies possibles dans tous les domaines : des matériaux rares comme le magnésium sont employés pour la réalisation des bras de suspension ; les portes sont circulaires pour s’ouvrir en basculant (attention les doigts) ; on expérimente un dispositif d’éclairage s’inspirant des lucioles, le toit du véhicule est en toile cirée et les vitres en mica pour alléger l’ensemble… Chaque prototype fait l’objet d’essais au centre de La Ferté-Vidame. Et Pierre Boulanger donne son aval à chaque étape. Dès qu’une solution aboutit sur un excès de confort, elle est rejetée : deux idées toutefois seront conservées : le dispositif de chauffage que les ingénieurs s’étaient confectionné pour les essais en hiver, à partir de manchons en feutre récupérant les calories du tuyau d’échappement, et l’habillage des portes et de la sellerie que Mme Boulanger avait suggéré à son époux.

À l’aube de la Seconde Guerre mondiale, les 49 études et projets dirigés par André Lefèbvre aboutissent à une voiture en tôle ondulée d’alliage d’aluminium très fine, équipée d’un bi-cylindre à plat de 375 cm3 refroidi par eau. Le , 250 voitures sont déjà assemblées à l’usine de Levallois-Perret. Quelques jours plus tôt, le 28 août, l’administration des Mines avait donné son agrément, avec une mention juste passable, pour sa commercialisation. Sur ordre du patron, la guerre étant imminente, toutes les « Type A » sont démontées et détruites. Quelques-unes, essentiellement des prototypes, sont cachées à La Ferté-Vidame dans les greniers du centre d’essai, ou dans les sous-sols du bureau d’étude de Citroën, rue du Théâtre. Pendant l’occupation, les Allemands, qui étaient au courant de l’étude de cette TPV, demandent à Pierre Boulanger de mettre à leur disposition les plans de cette TPV en échange de la divulgation des plans concernant celle qui deviendra la « Volkswagen ». Le patron de Citroën refuse cet échange. À partir de l’année 1941, après le bombardement de l’usine du quai de Javel, les études de la TPV reprennent en cachette de l’occupant. On décide d’abandonner les matériaux coûteux, comme le magnésium qui est devenu introuvable. Le moteur reste encore longtemps refroidi par eau mais présente des problèmes de gel à basse température.

Après la fin de la guerre, le rythme s’accélère. Walter Becchia finit de mettre au point le « moteur boxer bicylindre », toujours bicylindre de 375 cm3 mais refroidi par air, développant 9 ch SAE, directement inspiré du moteur équipant la moto de celui qui réclama longtemps de pouvoir dessiner la TPV : Flaminio Bertoni. La TPV reçoit aussi une boîte de vitesses à trois vitesses et une surmultipliée, et le patron accepte enfin que l’on emboutisse toutes les pièces de la carrosserie de la future 2 CV ce qui autorise quelque galbes de tôles comme des jupes d’ailes à l’arrière. Elle dispose d’une plate forme rigidifiée par des entretoises avec dessus et dessous tôlé, une suspension très souple, paradoxalement très sophistiquée, à bras tirés et ressorts hélicoïdaux latéraux dans un pot cylindrique de chaque côté, avec amortisseurs à friction et batteurs à inertie en bout de bras derrière les roues, inventée par Léon Renault, qui lui procure sa fabuleuse tenue de route, mais qui généraient des ultra-sons insupportables pour certains animaux, particulièrement les chiens.

Le souci d’économie conduit à des solutions techniques parfois minimalistes, par exemple les essuie-glace actionnés par le compteur de vitesse quand la voiture roule ou les joints de Cardan non homocinétiques, ce qui fait « brouter » la voiture dans les virages ou quand les roues sont braquées,(ces points seront corrigés dans des versions ultérieures en série à partir de 1965). Autre exemple : sur les prototypes, le moteur bicylindre est démarré avec une ficelle (comme sur les tondeuses à gazon), solution trop spartiate, qui ne sera pas conservée sur les 2 CV définitives. Autre exemple : du fait de l’absence de Delco par économie, les bougies sont alimentées à chaque tour moteur (juste avant le point mort haut), et non pas une fois tous les deux tours ; conséquences, les bougies s’usent donc plus vite. Autre exemple encore : la jauge à essence n’est pas un cadran sur la planche de bord, mais une tringle amovible graduée enfoncée dans le tuyau de remplissage du réservoir. Elle sera par contre la première voiture de série à être équipée de pneus à carcasse radiale fournis par Michelin dès son lancement, mais cela aussi trouve ses raisons dans l’économie de fabrication. Le , au salon de l’automobile de Paris, Citroën présente la 2 CV type A presque définitive. Elle n’est pas encore disponible et il n’est pas possible de voir ce qui se cache sous le capot. Elle est énormément critiquée par la presse qui n’a pas apprécié le silence de la firme autour de son projet. Malgré cela, l’accueil du public est plus enthousiaste. Une plaisanterie est lancée : « Obtient-on un ouvre-boîte avec elle ? ». Le succès de curiosité est aussitôt refroidi par son prix qui n’est que provisoire et par des délais de livraison trop flous. Très rustique, avec une silhouette déconcertante, elle semble issue du concours Lépine. La presse se fait alors très critique sur son design.

En 1949, juste avant l’ouverture du salon de Paris, 1 exemplaire est présentée au service des Mines et désignée « Type A » (comme la TPV en 1939). La production de la 2 CV type A peut commencer alors, avec un modèle unique et une seule couleur disponible. Elle est vendue sans serrure de portes : le dispositif d’antivol proposé étant celui adopté sur les bicyclettes, pris entre le volant et la barre centrale du siège avant. Les seuls instruments du tableau de bord sont un tachymètre et un ampèremètre. Dans le même esprit de sobriété, le dépliant qui présente le produit est simple : quatre pages au format d’une carte postale (9 × 13 cm), imprimées en monochromie avec quatre photos. Une innovation incluse depuis le début de la production fut le montage en série des nouveaux pneus à carcasse radiale de Michelin, commercialisés pour la première fois sur la 2CV 8. Cette conception radiale faisait partie intégrante de la conception du châssis de la 2CV9.

Au début des années 1980, boudée dans de nombreux pays à cause de réglementations de plus en plus strictes en matière de sécurité, de résistance et pollution, etc., la « deuche » comme on l’appelle familièrement est de moins en moins produite, elle se fait vieille et n’est plus exactement au goût du jour même si elle a su dépasser les modes et les époques. Elle obtient néanmoins encore quelques succès, par exemple en Allemagne, où l’on vend plus de 2 CV que d’AX. La 2 CV est relativement chère par son choix de conception (entièrement démontable) : elle nécessite beaucoup plus d’heures de main-d’œuvre pour sa fabrication qu’une auto moderne (elle est quasiment entièrement montée à la main, sans aucun robot, au contraire des voitures modernes de l’époque), mais en contrepartie sa « réparabilité » est largement supérieure à n’importe laquelle d’entre elles (en principe, n’importe quel mécanicien peut la réparer avec un outillage de base, bien que ce concept original connaisse quelques sérieuses limites. Les moyeux arrière, par exemple, demandaient un outillage spécial que bien peu de mécaniciens possédaient, avec le résultat bien connu à l’époque : la majorité des 2 CV avaient des freins arrière totalement déficients parce qu’inaccessibles à la plupart des garagistes. Seuls les ateliers agréés Citroën possédaient cet outillage. Citroën connaîtra pourtant un dernier succès avec la 2 CV 6 : la Charleston, qui est une série limitée produite à partir d’octobre 1980 à 8 000 exemplaires en noir et rouge Delage (avec cuvelage des phares en rouge Delage). Citroën la produira ensuite en série (mais le cuvelage des phares deviendra chromé). Deux autres coloris apparaîtront au fil des ans : une version Charleston jaune Hélios et noir (1982-1983, modèle rare), et une version Charleston deux tons de gris (gris Cormoran et gris nocturne). Pendant l’année modèle de sa nomination (1984), après avoir été surpris par la presse au volant d’une luxueuse voiture sportive (Ferrari 400), le Premier ministre Laurent Fabius rappelé à l’ordre par le chef de l’état François Mitterrand utilise sa Charleston personnelle pour se rendre à Matignon, assurant encore un peu de succès au modèle. Néanmoins, en 1988, la production de la 2 CV est stoppée à l’usine de Levallois-Perret (devenue très vétuste), là où les premières 2 CV furent construites quelque 40 ans auparavant. La production de la 2 CV 6, certes très vieillissante mais encore prisée par les jeunes, n’est alors assurée que dans une usine Citroën au Portugal, à Mangualde. Un projet de vente des outillages de fabrication à la Chine n’a pas connu de suite, la Chine jugeant cette automobile « dépassée » ; elle était pourtant alors très bien adaptée à ce pays dont près de 90 % des routes n’étaient pas revêtues.