RENAULT R5 Turbo 2

Le premier prototype de Porsche 911 est produit en 1959. Cette étude de style, connue sous le nom de « Projet T7 », est esthétiquement très proche de la Porsche 356, avec pour objectifs un accroissement des performances et du confort de cette dernière tout en conservant la forme originelle, malgré un empattement allongé de 20 cm au minimum. Ce projet constitue une difficulté pour les ingénieurs de la firme de Stuttgart, plus habitués à optimiser les modèles existants, que d’en créer de toutes pièces.

Cette liberté dans la conception est à l’origine d’un nombre relativement important de prototypes aux diverses solutions techniques. Le style esthétique, décidé par le chef du Département Carrosserie, Erwin Komenda, reste cependant relativement constant. Une équipe de stylistes, sous la direction du fils de Ferry Porsche, Butzi, définit une automobile 2+2 compacte mais renonce à la carrosserie tricorps de la 356, adoptant un arrière « fastback » dans l’optique de loger quatre adultes . Cette solution offre également l’avantage de présenter un meilleur coefficient de traînée.

Quatre ans plus tard, au Salon de l’automobile de Francfort 1963, Porsche dévoile son cinquième et dernier prototype, baptisé « 901 », qui préfigure le modèle de série 911.

Il s’agit ici d’une peinture complète, cette Renault 5 Turbo 2 avait besoin d’une nouvelle robe.

Un peu d'histoire

Nous sommes dans les années 70, Renault a lancé sa R5 qui connait un énorme succès et déjà une version sportive préparée chez Alpine pointe le bout de son nez. Cependant, 2 personnes au sein de la régie imaginent un dérivé pour la compétition, autrement plus radical. L’idée suit son chemin et séduit tour à tour les responsables de la régie. Ainsi démarre le projet 822, plus connu sous le nom de Renault 5 Turbo…

La naissance de la Renault 5 en 1972 est un événement marquant dans l’histoire de Renault. Destinée à un public jeune et féminin, cette citadine stylée va connaître un succès fulgurant. Jusqu’à bouleverser le paysage automobile français. Mais l’arrivée de versions sportives va propulser la petite R5 dans le club très fermé des automobiles mythiques… Jean Terramorsi (ci-contre) et son adjoint Henry Lherm sont les deux initiateurs du projet R5 Turbo. L’idée d’une voiture vitrine pour dynamiser la gamme des Renault 5 nait au tout début de 1976, dans une confortable Renault 16, un soir, sur le trajet Dieppe-Billancourt. Après leur journée de travail, Terramorsi et Lherm, regagnant leur domicile, discutent à bâtons rompus d’une R5 très spéciale, « qui pourrait briller en compétition, qui complèterait la gamme, et, pourquoi pas, serait équipée d’un turbo », puisque c’est alors le credo de la Régie Renault. Pour mener à bien leur idée, ils vont donc devoir convaincre les responsables de la régie, dont Bernard Hanon est alors PDG, que le proto qu’ils veulent développer pour la compétition pourrait être adapté à une commercialisation en petite série. Leur premier cahier des charges comprend déjà les grands traits de la future sportive : un moteur turbo en position centrale, de grosses jantes et une carrosserie spectaculaire… tout un programme pour la paisible Renault 5 !

Après le décès brutal de Jean Terramorsi en 1976, le projet 822 se poursuit malgré tout sous la bannière Renault Sport, département compétition de la marque nouvellement créé sur les bases de l’atelier compétition d’Alpine à Dieppe. L’objectif initial de production vise un minimum de 400 exemplaires en un an, imposée par le règlement sportif pour l’homologation en Groupe 4. La principale contrainte est de descendre au minimum du poids autorisé en course dans la classe de cylindrée 2 litres, soit 850 kg, le véhicule de série ne devant pas excéder 950 kg.

Ne bénéficiant pas de budgets suffisants, une toute petite équipe est constituée autour de Gérard Larousse et Bernard Dudot, deux grands noms du monde de la F1. Le cahier des charges affiné prévoit une maniabilité hors pair, une tenue de route efficace et une puissance importante. Pour mieux convaincre la direction, la stratégie originale a cependant été inversée à mesure que le projet prenait forme. En effet, l’équipe élabore désormais une sportive de route qui pourrait, à moindre frais, se muer en véritable bête de compétition. Larousse envisage un prix de vente inférieur à 100 000 FF de l’époque… un rêve abordable pour bien des passionnés de voitures de sport !

Marc Deschamps, alors designer chez Renault sous l’autorité de Robert Opron, trace les premiers croquis de la Renault 5 Turbo en 1976. Puis, la création d’un prototype est confiée à la maison Bertone et, plus précisément, au designer Marcello Gandini. Parallèlement, un deuxième prototype est mis à l’étude chez Heuliez, qui devra s’occuper également d’une partie de la production (voir encadré plus bas). En effet, Renault ne dispose pas encore de son propre département pour les petites séries (rôle qui sera attribué au Berex à partir de 1979) et doit sous-traiter plusieurs étapes de la réalisation. Le style final sera peaufiné dans les détails par Yves Legal, le styliste Alpine.

Après un développement rapide, c’est en octobre 1978 que la clientèle découvre, ébahie, à l’occasion du salon de Paris, le premier prototype de la R5 Turbo désignée en interne sous le type usine R8820. Le modèle exposé n’a pas encore de moteur mais dans sa livrée rouge, avec ses extensions plastiques assorties et ses monumentales ailes arrières, cette « super » R5 crée l’événement ! Côté coup de pub, le but est atteint et sa cote de popularité va sérieusement profiter à l’image de marque de Renault, bien au-delà des frontières hexagonales. Le laborieux travail nécessaire à l’aboutissement du modèle définitif de série sera confié à la toute nouvelle entité, filiale de Renault créée en 1979, le Berex. Ce Bureau d’Etudes et de Recherche Exploratoire est basé à Dieppe dans les locaux laissés vacants par Renault Sport, parti à Viry-Châtillon dans l’usine Renault Gordini. Il faut attendre le salon de Bruxelles en janvier 1980 pour découvrir la version définitive de la Renault 5 Turbo, dotée cette fois de son moteur. Exposée aux côtés de la R5 Alpine Turbo et de la R18 Turbo, elle conforte Renault comme un leader de cette technologie et de la performance. La production démarre le 20 mai 1980, les 200 premiers exemplaires sortant très vite des chaînes pour les besoins de l’homologation. Le choix de couleurs est limité à deux teintes, rouge « Grenade » et le bleu « Olympe », les extensions plastiques sont teintées dans la masse pour être assorties à la carrosserie et de nouvelles jantes bicolores, elles aussi assorties, sont utilisées. Les voitures bleues possèdent également un intérieur rouge et vice versa. La R5 Turbo devient rapidement un symbole sportif, pas seulement en France mais aussi en Europe à travers le monde entier.

Pour motoriser la future bombe de la régie, on pensa tout d’abord utiliser le 1600 cm3 des Alpine A110, A310 et autres R12 Gordini et R17 TS. Sur cette base, plusieurs cylindrées et puissances avaient déjà été testée et il était assez facile de gonfler encore le bloc jusqu’à 1800 cm3 pour sortir les 200 chevaux prévus. Le second candidat était le nouveau 2 litres produit pas la Française de Mécanique pour le compte de Peugeot et Renault. Moderne et bien dessiné, il montra vite des inconvénients incontournables et fût recalé. Le troisième moteur en lice était nettement plus gros, puisqu’il s’agissait du récent V6 PRV. On disposait encore d’assez peu de recul sur ce moteur, déjà tout juste satisfaisant pour les voitures de série… Lui non plus ne conviendra pas au « projet 822 ». Restait enfin une quatrième solution pour l’équipe Renault Sport : le moteur 4 cylindres 1400 cm3 type 840-25 de la R5 Alpine… Le choix de ce moteur, revu par l’équipe de François Castaing, Philippe Chasselut, Serge Massé et Bernard Dudot permet à l’équipe de gagner un temps considérable. Converti sans trop de mal à la suralimentation, il rempli parfaitement les attentes en matière de puissance ! La R5 Turbo aura donc comme base le « Cleon » de la 5 Alpine et qui avec l’aide du turbo développe entre 150 à 160 ch DIN, soit une augmentation de 70% ! L’utilisation d’un bloc de petite cylindrée turbocompressé permettait aussi de garder plus facilement le poids sous la tonne comme prévu. Le premier prototype roulant, intégralement peint en noir, multiplie les sorties en toute discrétion au printemps 1978 avec Alain Serpaggi et Guy Fréquelin à son volant. De fait, il est impératif de le fiabiliser, en commençant par ses point faibles: culasse et joint renforcés, soupapes avec guides en laiton, manetons, villebrequin, pompe à huile… et remplacement du carbu double corps par une injection mécanique Bosch K-Jetronic. L’allumage est transistorisé et sans rupteur, le taux de compression est réduit à 7:1. Enfin, le turbo retenu pour apporter le souffle requis (à 0,8 bars) est un Garett T3, aidé par un échangeur air/air. La Renault 30 TX lui lègue sa boîte 5 vitesses dont le 5ème rapport est resseré, mais l’étagement demeure perfectible avec des trous importants entre les rapports. L’examen de passage devant les dirigeants se déroule comme prévu, malgré l’aspect encore très artisanal du prototype. La R5 turbo dépasse largement les 200km/h en pointe et avale le 1000m DA en moins de 28″. L’accord est donné, l’aventure peut continuer.